Le sable dans la vie d’un géotechnicien
Assis sur une plage, le sable devient un jouet pour un petit enfant. On le laisse couler dans les mains ; on le dépose en cônes sur le sol. Puis on constate assez vite qu’on en a partout, jusque dans les langes ou dans le maillot de bain. Ça gratte partout.
C’est la découverte.
En le mélangeant avec de l’eau, cela devient plus intéressant. On peut façonner des formes plus variées que des cônes. On peut faire des châteaux de sable. Mais attention, ça devient plus compliqué. Il faut savoir doser la quantité d’eau. Trop peu ça s’écroule, trop, ça s’écroule aussi.
Ce sont les premières expériences.
Plus tard, ça devient plus technique, mais ça reste ludique. Réaliser un bassin pour se baigner dans un torrent est une activité intéressante. Pour cela, il est nécessaire construire une digue. Les blocs et les grosses pierres ne font pas l’affaire; il faut colmater la digue avec du matériau plus fin. Le faire avec du sable ne résout pas encore le problème; il est emporté par l’eau et disparaît entre les blocs et les pierres. En y ajoutant des petites pierres et du matériau plus fin, cela va déjà beaucoup mieux ; le niveau d’eau monte dans le bassin te et le bain dans l’eau froide est devenu possible. Il fallait l’expérimenter!
C’est l’apprentissage pratique.
Puis cela devient plus sérieux. Il faut connaître les définitions et les propriétés techniques du sable. Les professeurs nous enseignent que le diamètre des grains de sable se situe entre 0.2 et 2 millimètres. On apprend que le diamètre n’est pas mesuré grain par grain avec une règle, mais par tamisage comme on l’avait déjà expérimenté avec un petit tamis sur la plage. On découvre aussi que le sable est constitué de calcaire, de silicates ou d’autres minéraux.
Des calculs compliqués permettent de déterminer le dosage du sable par rapport aux autres matériaux pour éviter le délavage du sable dans une digue.
C’est l’apprentissage théorique.
Le sable préoccupe le géotechnicien toute sa vie professionnelle. Il s’agit d’appliquer sagement les formules mathématiques pour des petits et grands projets de construction. En fait, c’est un peu plus compliqué parce que le sable cachera toujours un peu son jeu. La Place St. Laurent et Tolochenaz sont de ce point de vue intimement liés au sable. Mais le sable est surtout un formidable matériau de construction.
Ce sont les applications professionnelles.
Après toutes ces expériences professionnelles, revient le temps de la contemplation.
Dans la nature, de petits canaux sont creusés délicatement dans le sable par une petite averse. Le sable accepte volontiers la présence de ses plus grands frères, les pierres et se colmate avec ses petits frères et sœurs, le limon et l’argile. Il peut alors se dessécher, se rétrécir et former des unités géométriques.
De grandes quantité de sable peuvent se déposer aux bords de mers et de lacs. Bien plus tard, ce sable peut former des dunes ou des massifs sableux cohésifs qui peuvent être érodés par l’eau, formant des sillons profonds.
Sa couleur varie alors du gris, du beige au jaune vif et au rouge jusqu’à la couleur grenat.
Le sable devient objet d’art.
Cully, 30 décembre 2021